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The diaries of a disappointed perfectionist


Samia et Sami contre l'imbécile

Publié par Ibrahim sur 3 Novembre 2014, 23:01pm

Catégories : #couple, #Société, #Développement personnel, #échec

Samia et Sami contre l'imbécile

’Pick your shit up and get lost. I find your look disorienting … You will regret the day you met each other, both of you!’’. Sami savait bien que leur professeur d’anglais Mr Pascal les pointait du doigt, lui et son amie Samia. Ils savaient que leur expulsion n’était qu’une question de temps, et ce, pour la simple et unique raison (au moins celle énoncée expressément par Pascal), que leur attitude ne lui plaisait pas. Il s’est habitué à les mettre dehors pour une mauvaise réponse, de les empêcher de rejoindre la classe pour cause de retard, abstraction faite de la légitimité de son accusation, il leur donnait des 0 pour des hors sujets que lui seul était capable de déceler, il ne leur rendait pas leurs copies, ils les ignoraient totalement au cours des séances ... . Mais, il s’avère bien que that was the one, c’est la goutte qui fit déborder le vase. Avant qu’ils quittassent la classe, il leur chuchota avec ironie :’’One day, You’ll lose it dear friends’’. Ainsi, une fois out, il se précipita vers la feuille d’absence et se mit -à la grande stupéfaction des étudiants- à chercher Samie et Samia et prit des notes. Son visage était orné d’un sourire presque invisible, laissant croire à toute personne qui n’a pas assisté à la scène et qui n’est pas consciente du perpétuel conflit qui oppose le professeur au couple, que Mr Pascal vient de découvrir pour la première fois qu’ils n’étaient pas là et qu’il regrette amplement qu’ils ne le soient pas. Derrière son sourire enfantin, et son regard plein d’innocence et de bonne fois se cache un loup dont les apparences sont bizarrement contradictoires avec son essence. La même scène se répétait pour une période de 3 mois, à partir de la rentrée scolaire jusqu'à Novembre, sans jamais réussir à les irriter ni à les pousser à commettre un acte de représailles à son encontre. Certes ils étaient frustrés, mais pas suffisamment pour avoir le courage de s’exploser. Leurs ennuis ne trouvaient pas d’échos auprès de l’administration, et à chaque fois, on leurs assurait que Pascal est connu par sa discipline, son impartialité, sa compétence, et son attachement aussi bien à ses élèves qu’à la matière qu’il leur enseigne, accusant implicitement les propos de Samia et Sami de mal fondés tout en louant excessivement et gracieusement Mr Pascal (accentuant davantage cette infériorité idéologique vis-à-vis des étrangers).

 

Cette fois, c’était la bonne, l’hiver bat de plein fouet, il faisait froid dehors. Pascal leur demanda sévèrement de quitter la salle parce que leur look était ‘désorienté’ tout en les menaçant de regretter le jour où ils se sont rencontrés pour la première fois. Come on ! Style désorienté? Pascal, you’re better than this, you could have come up with a better excuse! Or, have you been running out of excuses lately? C’était une autre riposte spontanée à une énième provocation de ce maudit salaud que Sami a préféré garder pour lui.

 

Pascal leur indiquait la direction de la porte en leur infligeant un regard innocent teinté d’une haine loin d’être superficielle. Ce signe était le déclic qui allait laisser le monstre sortir de sa cage. Sans se poser trop de questions, Sami s’est jeté sur son professeur et se laissait emporter par cette colère noire qui s’est emparée de son esprit. Pascal était inoffensif, il semblait trouver du plaisir à recevoir les coups, submergé par les douleurs physiques et morales, et amplement excité voire extasié, il faisait preuve d’un trouble de comportement laissant croire que c’est un sadique. Pour lui, l’immense excitation émane du fait que c’était enfin le moment venu, l’évènement tant attendu et le motif assez solide pour expulser ces deux idiots.

 

Le couple Sami & Samia était le plus stylé de la classe, ils étaient comme ça. On les adorait pour leur simplicité, qui était en quelque sorte, leur trait particulier. Ils se réjouissaient du hit ‘’Mr Brightside’’ (The Killers) et de ‘’Lemon Tree’’ (Fool’s Garden) sans pour autant déranger ceux qui les entourent ni de chercher à se faire voire, et ce, en mixant les 2 hits à la fois with their mouths. Ils plongeaient dans les péripéties du Roman ‘’Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire’’ de Jonas Jonasson sans se soucier de sa valeur artistique, et à chaque fois, ils se trouvent surpris par les Personnages et lieux historiques que Allan avait visité. La véracité du récit ne les intéressait guerre, c’est la personnalité d’Allan qu’ils ont adorée le plus et ils le soutenaient jusqu’au bout. Ils analysaient ‘Antichrist’ (film sorti en 2009 réalisé par Lars Von  Trier) comme s’il s’agissait d’un chef-d’œuvre artistique, alors que son réalisateur ne l’a produit que pour exprimer une dépression profonde qui a duré 2 ans, ils essayaient de décortiquer les personnages et la signification de chaque acte. Ils ne semblaient pas fournir assez d’effort pour être ensemble, et ce, malgré le poids accablant que toute relation est censée produire, Milan Kundera l’a exprimé clairement à travers le titre de son roman : l’insoutenable légèreté de l’être. Leur présence était un signe de joie pour les autres, des messagers de l’amour, des tourtereaux, on les enviait sans pour autant qu’on espère que leur amitié prennent fin. Et pourtant, Pascal en pensait autrement, dès la rentrée scolaire, il leur adressa la parole :

 

- Hey! Lovebirds, stop looking at each other, I don’t like your attitude.

 

Et c’était l’expression ultime de la pensée de Pascal, il n’aimait pas leur attitude, un prétexte qui va longtemps perdurer avant que son essence se dévoile. Pour les étudiants, c’est clair que Mr Pascal avait des problèmes, que l’odeur de l’alcool dominait son haleine et que sa préoccupation était de passer le temps sans s’intéresser à la matière qu’il enseignait. Et pourtant, personne n’avait le privilège de découvrir l’histoire de Mr Pascal.

 

La scène a duré quelques minutes, Sami voulait causer le maximum de peine possible et laisser un stigmate qui rappellera à Pascal ce qu’il leur a fait subir d’ennui. Sami a succombé aux tentatives de ses camarades de classe de calmer son ardeur, il était encore en colère, il luttait pour leur échapper et aller écrire le dernier chapitre de sa vengeance. Pascal était allongé par terre, plongé dans un bain de sang, violemment heurté par cet adolescent hors contrôle, sauf que son visage était orné d’un sourire malveillant derrière lequel se cache tant de plaisir que d’amertume. Par un regard méprisant, il s’approchait de Sami et chuchota d’une voix grave :’’I got you son of bitch, I’ve warned you several times, I've asked you to stay away from her, to keep your distance. Wasn't obvious moron that I was always trying to destroy both of you ?’’ . Sami était ému, voici la grande révélation de l’année qui vient de confirmer ses soupçons,  Pascal a enfin extérioriser sa haine vis-à-vis d’eux, Sami pensait que ce haineux vieillard éprouvait un quelconque sentiment pour Samia, avant de se rappeler que les provocations étaient contre le couple et non pas contre l’un d’entre eux.

 

Dans un autre récit, j’aurais considéré Pascal comme le méchant de l’histoire, et le couple Samia & Sami les héros qui font face au mal. I wish things were that simple. Mais elles ne le sont pas, et il serait alors simpliste d’essayer d’analyser les évènements sans avoir suffisamment d’informations ni sur le contexte ni sur les personnes elles-mêmes.

 

Avant de s’installer au Maroc, Pascal habitait à la banlieue de Paris, il avait dès son jeune âge souhaité devenir écrivain, il lisait tout, Stendhal, Victor Hugo, Proust, Marcel Pagnol, Guy de Maupassant ... La situation financière de sa famille ne lui permettait pas à chaque fois d’acquérir un nouveau roman. Ainsi, une fois il termine la lecture, il l’échange contre un nouveau. La règle qui stipule que l'être humain est une créature sociable ne le concerne pas, il était en quelque sorte l'exception qui confirme cette régle, de sorte que son meilleur ami n'était rien d'autre que ce livre dont la présence est éphémère mais dont l'impact influencera surement la destinée de ses futurs petits enfants. Il lui procurait des informations et des leçons tirées des expériences des auteurs (pas forcément), il  initiait son esprit aux nouveaux modes de pensée. Pascal considérait le livre comme son lieu sacré, son ultime refuge face au vacarme de sa famille, et comme l’incubateur infaillible de ses pires folies. il n’arrivait jamais à comprendre ce qui poussait son père à taper sa mère avec tant de violence et de ferveur et de pouvoir diner ensemble comme si rien ne s’est passé. Pire encore, ils se sont tous accoutumés à cette situation devenues banales à force de répitition et ne suscitant plus l'indignation du petit Pascal. Après un round de coups et de gifles, elle se précipite à la cuisine pour préparer quoi manger et revient souriante, peut-être qu’elle voulait conserver son mariage (un mariage est à consommer et non pas à conserver) mais elle est tout à fait consciente qu’elle n’a pas d’autres solutions, elle n’a pas de diplôme, ni un savoir-faire dans quiconque domaine, ne peut sortir de sa maison sans avoir l’autorisation de son mari (et oui, la France en 20ème siècle ressemble au Maroc de nos jours, sans pouvoir autant généraliser) ,pire encore, elle s’est habituée à son rôle de femme de foyer, dont la vie est articulée autour de la satisfaction d’un mari qui la maltraite pour un Oui ou pour un Non, l’éducation de ses enfants, et bien sûr la procréation d’autres enfants, et ce, dans un dévouement inexplicable qui l’empêche même de s’indigner contre la maudite vie qu’elle mène, en considérant que c’était son rôle, et qu’elle était là pour permettre à la mission divine de se déployer. C’était l’un des prétextes les plus forts et les plus convaincants qu’elle a accepté et défendu pour légitimiser sa soumission et montrer à quel point son existence est importante. Pascal a été donc non seulement le mélange des ADN de ses parents, mais aussi de leurs caractères. Il n’a développé que les défauts qui ont marqué son adolescence. Il condamnait leur attitude à tel point qu’une phobie de reproduire les mêmes erreurs s’est imposée comme un tuteur susceptible lui aider à agir autrement et dont les consignes sont des ordres à respecter, il est devenu par conséquent une copie authentique dont les principaux traits de caractère sont issus du vacarme familial au sein duquel il a passé ses 18 premières années (un tel héritage illogique pour certains, incompréhensible pour d’autres, a été façonné suite à une prise de conscience imparfaite de la nature du conflit parental, entachée d’une victimisation qui relève de son analyse personnelle de la situation et qui ne reflète pas nécessairement la réalité). Il a rallié alors la lâcheté et l’hésitation de sa mère, la violence virile de son père, et l’élégance linguistique des livres qu’il a dévorés.

 

Le jeune Pascal lisait et lisait et lisait ...  Jusqu’à ce qu’il obtint son baccalauréat, il était tellement fasciné par les langues qu’il décida de s’investir à fond dans l’Anglais, il quitta enfin son foyer une fois pour toutes, s’inscrivit en université, et partagea un petit appartement avec des camarades de classe. El là, toute sa vie avait pris un tournant décisif, en une fraction de seconde, son existence a été bouleversée d’une manière irréversible, de telle sorte que le Pascal d’avant cet événement avait cédé la place à celui d’après. En effet, il a été amplement fasciné par une jeune fille, elle était d’une beauté extrêmement abondante et se démarqua aisément de tout ce qui l’entoure (c’est un avis personnel qui concerne l’intéressé : Pascal). Il voulait l’aborder, sans pouvoir trouver cette première phrase magique qui brisera la glace et dont dépendra largement la première impression perçue par Salma, il essayait de se rappeler d’un livre ayant traité ce thème, sans pour autant avoir du courage d’aller pratiquer ce qu’il avait appris. Puisqu’il n’a pas pu aller directement et droit vers le but, il se contentait de la contempler à chaque fois que l’occasion se présente. He grows up believing that he would never be happy until the day he met the one. Une conception de l’amour qui ne dérape pas de celles communément adoptées par des jeunes exposés violemment aux Soap operas et aux TV reality shows, et dominés par des pratiques issues de l’inconscient collectif que nous avons hérité.     

 

Un jour, alors qu’il vient de la perdre de vue, il regain sa place et reprend un roman en anglais, le silence fut secoué par quelqu’un qui frappait à la porte. Il s’approcha prudemment, ses connaissances étaient limitées aux colocataires, et même ces derniers ont leurs propres clefs. À sa grande surprise, c’était elle, Salma. Il fut si perturbé qu’il était sur le point de fermer la porte et de mettre fin à une histoire d’amour qui n’a pas encore vu le jour. Elle lui demanda poliment en toute confiance :

 

- Bonjour monsieur, je suis Salma et j’habite dans le bâtiment d’à côté. Je pense que votre chat Albert est coincé sur le toit et qu’il est sur le point de mettre fin à sa vie. Je voulais vous aviser au cas où vous pourriez aller lui parler !

 

Avant de se rendre compte qu’il n’a pas de chat nommé Albert, que les chats par conception ne sont jamais coincés sur un toit, et que personne ne parle le langage des chats, il lui a répondu en toute précipitation : ‘’Mais bien sûr’’. Il claqua la porte, la rejoignit et rétorqua ‘’On prend les escaliers de secours pour ne pas perdre de temps !’’. Toujours confidente, Salma lui répondit :’’Vous savez bien monsieur que contempler les gens est un crime puni par la loi. Je voulais juste vous informer que vous pourriez être poursuivi en justice en vertu des articles 1382 et 1383 du code civil, et ce, pour des troubles anormaux de voisinages’’. 

 

Pascal s’arrêta brusquement, devint pâle et se trouva étouffé. Lui, qui était sur le point de sauver un chat qui n’est pas le mien (et dont l’existence est à prouver) pour montrer son courage à sa bien-aimée (en secret)- et à sa grande stupéfaction- vient de découvrir qu'il peut être assigné en justice pour un crime qui ressemble à un harcèlement sexuel. Encore ému, il voulait se défendre en essayant de l’assurer qu’il aime contempler les gens et qu’il ne l’a jamais vue. Elle interrompit encore son monologue interne et lui dit en rigolant :’’C'était plausible, je t'ai eu ! Vraiment ? tu pensais que tu vas être assigné ? Je voulais juste rigoler. Mais ça n’empêche pas de te dire que je t’ai vu à maintes reprises penché sur ton balcon en train de me contempler.’’ Elle s’arrêta pour un instant, comme si elle lui céda la parole. Encore ému, il lui lança sans se poser trop de questions ‘’Je n’ai jamais vu de si fascinant que votre présence, tu me plais  et ... !’’.

 

Elle rétorqua : ‘’Tout d’abord, je n’ai pas encore eu le privilège de connaître ni ton prénom ni ton histoire, mais tu dois monsieur dès le départ avoir en tête que je suis musulmane, est que toute relation en dehors de l’institution du mariage est aussi bien non tolérée que prohibée par notre religion’’. Malgré son ton qui laissait croire qu’elle s’en foutait, qu’elle était venue lui parler seulement pour qu’il cessera de la dévorer par les yeux, elle semblait l’admirer et adorait sa simplicité. Surpris, il lui demanda :

 

- ‘’Vous n’avez pas l’air d’une musulmane, pas de voile, ni de gant, et surtout pas cette réserve qui vous pousse à éviter de parler aux hommes. Il est rare de tomber sur des musulmans qui ne sont pas obsédés par votre fameuse distinction Halal/Haram’’.

 

- Elle lui répondit, et à sa grande stupéfaction, que ‘’l’Islam, avant qu’il soit exprimé par le voile ou par une longue barbe, est une question de foi’’. Elle continua : ‘’je suis musulmane, je prie, je jeune ramadan et j’essaie de donner l’exemple à mon entourage d’un islam modéré, qui est avant tout, un mode de vie conçu pour nous rendre heureux tout en honorant nos obligations envers Allah. On m’accuse parfois de laïcité, mais ça reste une conception personnelle qui doit être respectée, surtout ces barbus qui sont perdus entre ce qui est permis et ce qui est interdit comme si l’Islam était conçu pour nous contraindre’’.         

 

Surpris par ces révélations, Pascal n’avait jamais lu dans un bouquin une conception aussi bien claire que directe à propos de l’Islam. Il était comme la plupart des gens en occident, perdu entre l’image extrémiste qu’associe Al Quaïda (et maintenant l’Ètat Islamique en Iraq et au Levant) à l’Islam et celle laïque que véhiculent les ressortissants de la 2ème et 3ème génération des immigrés.

 

Ainsi, Chose dite chose faite, Pascal s’est converti en Islam sans avoir réussi à se poser les bonnes questions sur la portée et les enjeux de son choix, ni à assimiler l’intérêt de chaque pratique religieuse (pour lui, il s’agit d’une obligation divine, dont l’application est inévitable, et dont la transgression est impardonnable). Il voulait éterniser leur relation à tout prix. Salma l’aidait en lui proposant des œuvres pour mieux comprendre les points fondamentaux de sa nouvelle religion. Pascal a décroché son diplôme, Salma aussi. Alors qu’il était tenté par une carrière de professeur d’anglais, elle était juriste, elle voulait se spécialiser dans le droit des affaires. Leur réunion éternelle n’était qu’une question de temps, un dénouement autre que le mariage sera considéré comme une injustice flagrante de Cupidon à leur encontre (abstraction faite de la viabilité de leur union). Ils se sont convolés en justes noces, un évènement que Pascal avait savouré amplement, il croyait avoir gagné le jackpot, Bernard Shaw l’avait bien exprimé : ‘’les hommes seraient véritablement des saints s’ils adoraient Dieu autant qu’ils adorent les femmes’’. Alors qu’en réalité, il venait de se lancer dans une nouvelle aventure, dont la réussite est tributaire de la bonne intention, de la persévérance, de la flexibilité et surtout du respect d’autrui. Le mariage ne doit jamais être considéré comme une fin en soi, mais plutôt comme le début d’une affaire qui demande aussi bien du travail que de la persévérance.

 

Ils visitaient le Maroc, c’était la première fois que Pascal aie quitté la France, il était surpris par la beauté du paysage (certes la France dispose d’une nature éblouissante, mais c’était la présence de Salma qui a fait la différence et qui a révélé le charme dissimulé de la nature), ils ont sillonné tout le Maroc : Tanger, Tétouan, Chaoun, et après Fès, Ifrane, Rabat et puis Agadir, Marrakech et ils ont terminé leur séjour à Dakhla. Un mois inoubliable, c’est du jamais vu, surtout lorsqu’on est accompagné par une marocaine résidente à l’étranger qui a pris l’habitude de visiter annuellement son pays natal.

 

Toute bonne chose a besoin d’une fin pour qu’elle puisse être savourée (tout plaisir éternel n’est qu’une illusion qui masque une souffrance cachée), c’est fini les vacances. Ebloui par le charme du Maroc, et suite à la suggestion de Salma, Pascal n’hésite pas à accepter, ils prirent alors la décision de s’installer au Maroc. Salma était une MRE (Marocaine résidente à l'étranger) de la 3ème génération qui gardait toujours cet amour infaillible pour le Maroc grâce aux liens que ses parents ont tissés, entretenus puis consolidés à travers leurs visites régulières à leur terre d’origine. Elle avait de quoi ouvrir un cabinet et s’est alors lancée dans sa carrière de juriste, alors que lui, il a opté pour une école privée où il enseignait l’anglais, et ce, avant d’intégrer la fonction publique par le biais d’un lycée situé à Meknès.

 

L’affaire de Salma tournait à merveille, ils habitaient à Rabat, Pascal faisait alors la navette, mais les choses semblent ne pas marcher comme avant, Salma toujours souriante, pleine de bonheur, de passion et de joie de vivre, se trouve perturbée par un Pascal tout le temps agacé, il était perdu, ils ne lisait plus, ni en français ni en anglais, il passe son temps dans une classe bourrée de jeunes adolescents, il les enseignait l’anglais, une matière qui leur était totalement inconnue, ainsi, la plupart des étudiants manifestaient leur désintéressement en s’absentant ou en perturbant les cours. Pascal a toujours rêvé d’être un grand écrivain, sauf que la roue a tourné, et tourne encore sans que rien ne se passe. Il était écrasé sous le poids accablant de la routine, il a renoué avec l’alcool après sa décision d’y renoncer suite à sa conversion à l’Islam. Il est devenu alors perdu et dépourvu de toutes raisons. Pour lui, certes boire fait perdre la raison, mais aussi désinhibe et alimente la créativité, il était toujours tenté par l’idée de rédiger son premier roman. Salma savait bien que Pascal d’aujourd’hui n’est pas Pascal qui était perturbé lorsqu’elle lui a annoncé qu’il va être poursuivi pour des troubles anormaux de voisinage. Oh le beau vieux temps !

 

Un jour, alors qu’il était en pleine ivresse, Pascal s’est jeté sur Salma voulant lui casser la figure. Elle s’est défendue bravement. Certes elle a reçu quelques coups, mais elle n’était pas prête à être humiliée par un ivrogne pour la simple raison que quelqu’un le regardait de la télé et que c’est elle qui a hébergé ce quelqu’un, qui n’est rien d’autre qu’un journaliste en train de présenter le JT d’informations. C’était la première fois qu’il se permet une chose pareille mais aussi la dernière, puisqu’elle a quitté sa maison, et lui a demandé de divorcer. Elle était sûr et certaine plus que jamais, que Pascal lui est devenu étranger, et que toute tentative de conciliation ne va que perdurer sa souffrance. Dans la vie, on doit être doté d’une considérable dose de clairvoyance pour pouvoir déterminer avec certitude le bon moment pour se retirer aussi bien d’une affaire que d’une relation.

 

Pascal voyait les choses autrement, il ne s’est pas rendu compte combien il a changé, il n’a pas remarqué qu’il ne faisait plus la prière, qu’il est devenu alcoolique et qu’il ne communiquait plus avec sa femme (et ça fait à peine 7 mois qu’ils n’ont pas fait l’amour). Il songea que tout était bien, que c’est Salma qui est devenue vaniteuse après avoir réussi son affaire. Il se rappela de sa mère après les rounds de gifles et de sa réaction souriante. Il se dit :’’J’aurais dû dès le début savoir qu’elle n’est qu’une bonne à rien, elle m’a poussé à quitter mon pays d’origine, à changer ma religion et à abandonner mon rêve de devenir écrivain pour vivre ensemble. Quelle salope ! ‘’.

 

Il omet volontairement les jours où elle lui avait demandé avec persistance de se lancer dans son premier roman, elle essayait de l’inspirer par des voyages à la découverte des gens et des endroits nouveaux, lui racontait les histoires des gens qu’elle côtoie tous les jours. Et pourtant, à chaque fois il tergiversa et se cacha derrière des prétextes mal fondés. Son défaut majeur que Salma n’a jamais pu lui révéler mais qui en était tout le temps consciente est qu’il était un grand lâche qui cherche à culpabiliser son entourage pour être en abri de leurs reproches, en plus d’une absence flagrante d’intelligence émotionnelle, il agit machinalement, mais elle l’aimait pour ce qu’il était. Des défauts qui se sont manifestés après que leur relation eut passé par de rudes épreuves.

 

La vie a façonné un monstre qui n’a pas pu analyser sa situation avec recul, et elle (la vie) a alimenté sa frustration en l’exposant à des expériences décevantes. Au lieu de le conduire à un éveil spirituel et le pousser à agir autrement, la haine s’est emparée de son esprit et il blâma l’univers pour ses propres problèmes. Il s’est fait submerger par le noir, il ne détestait pas les femmes, sinon il aurait dû devenir un assassin en série, dieu merci qu’il est un type lâche, il s’est contenté alors d’extérioriser sa haine à son environnement. Le couple Samia & Sami n’était que le bouc émissaire au nom de l'amour.

Le passage des 2 amants devant le conseil de discipline a été marqué -comme vous pouvez le deviner- par un vacarme flamboyant attisé par les accusations échangées entre les 2 parties, et il a accentué l'air machiavélique que revêtait Pascal. Ce dernier affirmait et défendait avec tant d'acharnement et de ferveur la complicité de Samia et l'intention préméditée du couple de nuire à son bien-être.  

 

Après une délibération à huis clos, ils étaient expulsés définitivement du lycée. Et puisque cette décision disciplinaire était envisageable, toutes les parties semblent avoir accepté calmement la nouvelle. En fait, toutes les parties sauf Sami. Il gardait pour lui le droit de riposte, et avant même que la décision finale soit prononcée, il s'est mis à préparer sa vengeance. Ayant déjà terminé la phase de conception, il attendait le bon moment pour entamer la phase d’exécution. Il allait s'infiltrer en pleine nuit à l'appartement de Pascal, fermer soigneusement toutes les fenêtres, laisser le butane asphyxier son cher enseignant, et ce, sans laisser de trace, et enfin aller savourer sa vengeance sous le clair de lune. La police ne s’en rendra pas compte, difficile de présumer qu'il s’agissait d’un crime, plus précisément d'un meurtre, accompagné de circonstances entraînant l’aggravation des peines (si la responsabilité pénale est bel et bien prouvée) comme le guet-apens, la préméditation et l’escalade.

 

Le 31 décembre, le plan de Sami est d’attendre que Pascal rentre chez lui, il sera sans doute ivre, une fois les lumières éteintes, Sami va entrer par les escaliers de secours, puis par la fenêtre directement à la cuisine et mettre en œuvre son plan. Sami avait l’impression que quelqu’un le surveille, il pensa que c’était Samia même s’il n’avait jamais exprimé ses intentions vengeresses, mais il n’y avait personne. Lorsqu’il aperçut la dernière lampe éteinte, il se lança. L’exécution de son plan a été impeccable. Alors qu’il était sur le point de quitter le quartier avant que sa présence soit remarquée, ravi d’avoir réussi sa vengeance et troublé par l’atrocité de son acte, un ombre apparut de n’importe où et s’approcha de Sami, c’était une femme d’une quarantaine d’année, c’était Salma. Sami pensa que c’est une policière civile. Alors qu’il voulait prendre la fuite, elle lui assurait avec un sourire plein d’angoisse qu’il n’a rien à craindre, et lui demanda ce qu’il faisait en pleine nuit du nouvel an dans une heure pareille dans l’appartement de Pascal. Elle était persuadée que cet inconnu tenu devant elle n’est pas un cambrioleur ni voleur, qu’il n’a pas de pizza à délivrer et que ni sa tenue ni son aspect ne laissent croire que c’est un homosexuel. Confus, Sami lui répondit :

 

- Mais qui êtes-vous madame ? Vous connaissez Mr Pascal ?

 

- Confiante (comme elle l’a toujours été), Salma répond : ‘’C’est mon ex-mari’’. L’allure de Sami était rassurante et encouragea Salma à continuer : ‘’on a divorcé ça fait un an. Et je suis venue le voir pour célébrer le nouvel an. Je l’attendais pour des heures et des heures avant qu’il apparaisse vers 3 heures du matin, et me voilà à cette heure tardive en train de mener une conversation avec un jeune qui m’est totalement inconnu’’. Sans avoir l’intention de l’accuser, une pensée négative s’est emparée de son esprit, elle savait que derrière la présence de ce jeune homme se cache une immense calamité. Elle lui demanda : C’est un règlement de comptes ? Il t’a fait du mal ?

 

Sami reste perplexe face aux révélations de cette mystérieuse Salma. Il la contemplait lentement pour s’assurer que ce n’est pas une prostituée, et pourtant, elle lui avait annoncé la raison pour laquelle elle est là. Les apparences sont trompeuses.

 

- ‘’Votre ex-mari est un foutu ivrogne. Après 3 mois de provocations couronnées par une flagrante expulsion, je me suis laissé emporter par le noir. Je pensais au début qu’il aimait ma petite-amie Samia, il s’est avéré qu’il n’arrive même pas à s’aimer. Je pensais qu’il était jaloux de nous, il s’est avéré qu’il vivait seul. Récemment, je me suis jeté sur lui en pleine séance, et ce, juste après qu’il nous a expulsés pour la énième fois. La conséquence de ma colère était douloureuse : nous avons été expulsés définitivement du lycée’’. Avec un ton aigu, il ajouta avec hésitation : ‘’Me voilà devant vous ! Je viens d’asphyxier votre ex-mari avec le gaz du butane. En tout cas, je n’ai rien à perdre. Il a gâché mon futur’’. Lui rétorqua.

 

Salma l’empoigna avec ferveur d’un geste inattendu et lui ordonna de l’accompagner à l’appartement de Pascal, en escaliers, elle lui assura que si son ex perd la vie, elle l’assignera face aux tribunaux. Cette menace n’a duré que quelques secondes, car lorsqu’ils ont mis les pieds à l’appartement, ils découvrirent que Pascal était encore en vie même s’il était allongé par terre.

 

Sami les accompagna à l’hôpital (il vient de découvrir que l’acte qu’il était sur le point de commettre est plus atroce qu’il croyait). Salma adressa la parole à Sami : ‘’Tu penses qu’on tuant Pascal tes problèmes vont être réglés ? Je t’assure que non. Pire encore, tu vas mener une vie hantée par le meurtre que tu as commis. Tu ne pourras jamais être en paix avec toi-même. Pascal est devenu une personne autre que celle que j’ai mariée, il s’est complétement métamorphosé. T’es encore jeune, toi et ta petite-amie Salma. T’es sur un croisement décisif, il y a l’avant et l’après expulsion, et tu as le choix entre : procéder aux représailles pour faire plaisir à ton égo, ou bien tu peux t’inscrire en baccalauréat libre et revenir à la fin de l’année au lycée pour montrer votre diplôme à Pascal. Analyse bien ces 2 choix en termes d’impact sur ta vie et sur ta destinée, discute avec Salma et prend une décision que tu ne regretteras jamais’’. Elle était consciente que la solution était de persuader Sami de l’inutilité de son acte, et non pas à travers une approche violente.  

Sami semble découvrir des informations secrètes qui lui ont été cachés pour longtemps, il remercia Mme Salma pour sa sincérité et ses précieux conseils, s’excusa sincèrement, et remercia Dieu de l’avoir donné une deuxième chance.

 

A 4 heures du matin, en revenant à pied chez lui, Sami analysait longuement ce que cette dame vient de lui révéler. Il trouva des explications aux actes malintentionnés de Pascal. Rien ne donne à personne le droit d’être cruel, mais Pascal souffrait, et pensait que le monde était contre lui.

 

Le lendemain, il appela Samia pour lui annoncer la bonne nouvelle, elle aussi lui avait quelque chose à lui annoncer. Elle lui assura qu’elle les a inscrits au baccalauréat libre et qu’ils peuvent récupérer les cours auprès de leurs amis et passer l’examen en mois de juin. Il était jaloux de Samia, car lui, il était emporté par ce désir de se venger, et pour l’examen du baccalauréat, il voulait juste proposer l’idée. En tout cas, il raconta l’histoire de Mr Pascal et Mme Salma sans évoquer qu’il était sur le point de l’assassiner. Il évitait de justesse la réponse à chaque fois que Samia lui demanda comment il a pu la rencontrer.  

 

Après des mois de travail continu, de volonté et de persévérance. Encouragés par leurs amis et propulsés par leurs familles. Ils ont réussi le baccalauréat. Fiers de leur accomplissement, ils ont décidé de ne pas aller chercher Mr Pascal, qui, malgré tout, ni qu’une autre victime non pas comme il le prétend de la société, mais de sa conception personnelle de la vie.

 

Ibrahim

 

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Bonsoir. Je tiens tt d'abord à te féliciter pour ce récit assez captivant. Franchement l'histoire est émouvante et dégage un bon savoir faire au niveau de l'imagination et lecture. <br /> Cela n'empêche quand même qu'il ya des trucs qui s'avèrent nécessaire à souligner: d'abord au niveau du point de vue adopter . Jai remarque que dans tes écrits en général et celui là en particulier tu privilèges le narrateur omniscient. À un certain niveau oui mais dominer la narration impose au lecteur réception passive, et tue l'effet du mystère qui dérange l'esprit et attise la curiosité. J'aurais bien aimé que tu cède la parole à tes personnages. Ensuite l'emploi de l'anglais dans les propos du prof était justifié mais le narrateur s'exprimant en anglais????!!! Je vois pas l'enjeu. Il y avait aussi un emploi abusif de l'intertextualite c'est comme si le narrateur avait besoin de quelqu'un pour renforcer ses arguments. D'autre part tu as trop tarde dans le flash back relatant le passé de Pascal avec Salma au point qu'on a eu l'impression que c'est une histoire à part entière. <br /> J'encourage ta plume et j'espère te lire très prochainement. Amitié
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I
Bonjour Naima !! Tout d'abord, je te remercie sincèrement pour ta réaction, sans jamais nier ni la véracité ni la pertinence de tes remarques.<br /> Mais je garde quand même pour moi le droit de riposte :) :<br /> -Tout d'abord, c'est la première fois que j'adopte le point de vue omniprésent, dans les autres récits, je faisais partie de l'histoire, sans jamais avoir la certitude de connaitre le vécu des autres personnages, je faisais donc des présomptions pour expliquer leurs actions (L'ANALYSE PERSPICACE DE L'ENTOURAGE AMBIANT / LE 4-2-3-1 AU LIEU DE 4-3-3 QUI A FAILLI ME COÛTER LA VIE / UNE NUIT BLANCHE / LE ROI DES ÉCHECS). Je suis tout à fait d'accord, que ça tue le mystère car les personnages agissent dans un champs bien limité et sous les yeux de l'auteur. Je vais prendre en considération cette remarque.<br /> - Pour l'emploi de l'anglais, avant que cet écrit soit une nouvelle, c'est un article posté sur un blog, du coup, je me permet tout :) Aussi, parfois l'idée est exprimée 1000 fois mieux en anglais qu'en français. Et je t'assure que l'emploi de l'anglais n'a pas été pour des raisons prétentieuses.<br /> - Pour l'intertextualité, si je ne me trompe pas, votre remarque est à propos des ''entre guillemets' que j'introduis de temps à autre: ''si l'idée claire dans ma tête, elle ne l'est pas forcément pour les autres'', ça évite les malentendus. Mais bon , je vais essayer de m'expliquer davantage dans la zone texte que dans la zone commentaire.<br /> - L'histoire de Salma/Pascal n'est pas une histoire à part entière, elle englobe l'autre histoire. L’interaction entre les 2 était pendant les 3 mois de confrontation avec Pascal. L'idée était d'expliquer les saloperies de ce dernier en fuyant dans son passé. Et ce, à partir de son enfance et jusqu'à l'après divorce. Je voulais en quelques sortes, mettre en avant la tendance naturelle de la vengeance et sa portée sur la destinée de la personne dans les 2 cas : La vengeance de Pascal était orientée vers lui même avant de l’extérioriser vers son entourage, Sami était sur le point de commettre la même erreur que Pascal: celle d'avoir besoin de faire face aux cruautés de la vie pour apaiser son ego. Le passé de Pascal avec Salma est le noyau de l'histoire, même l'expulsion du couple Sami/Samie tire son origine de ce passé.<br /> Encore merci Naima pour tes remarques. Elles seront prises en considération dans mes prochains écrits nchallah :)

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